11 décembre 2007

Interview de Kôji Kondô - 1991 (2/2)


Voici la deuxième partie de l'interview de 1991 de Kôji Kondô consacrée à Super Mario World. Si vous n'avez pas encore lu la première partie, cliquez ici. Avant de commencer, chantons tous en chœur un grand merci à Jonathan pour sa traduction !


Q : Combien de temps a duré la production musicale pour Mario World ?

R : Je me souviens qu’au bout d’un an, on en était encore à se dire « ça en est toujours là ? », donc je pense que ça a dû prendre environ un an et demi. De plus, on en était au tout début de la Super Nintendo et il fallait apprendre à tirer parti des outils de développement. A cela s’ajoute le fait que je travaillais sur d’autres titres en même temps.

Q : Les titres qui sortent sur Super Nintendo sont de plus en plus riches… si vous deviez remettre le « Prix Kondo » pour la qualité des musiques d’un jeu développé par d’autres studios, quel serait ce ou ces jeu(x) ?

R : J’aime bien Ultraman. Les sonorités « anciennes » utilisées rappellent très bien l’ambiance originale. De même, les musiques d’Actraiser et de Gradius étaient sublimes.

On se rend compte que selon les jeux, le type de travail à effectuer est assez différent.



Q :Les capacités sonores de la Super Nintendo ont-elles encore des secrets pour vous ?

R :Eh bien, je dirais que j’arrive quand même à déterminer ce qui est possible et ce qui ne l’est pas, mais comme je n’ai pas non plus fabriqué les outils sonores, oui, il y a bien des choses que j’ignore.

Q : Vous arrive t-il d’aller vous-même expliquer les fonctionnalités des outils de développement sonores lorsque vous les livrez aux compositeurs d’autres compagnies ?

Lorsqu’on livre des machines de développement aux éditeurs tiers, je suis accompagné de la personne qui s’est occupé de la création des outils. Ainsi lorsque que nous avons des questions, nous les lui posons directement.

Q : Nous sommes passés de la Famicom à la Super Famicom et on parle déjà de support CD pour la musique de jeux dans un futur proche. Est-ce que cela va bouleverser la création sonore ?

R : Tout à fait. Par exemple les sons de la Famicom sont produits à travers des ondes dites « triangulaires » et « carrées ». Maintenant on intègre directement les sons du synthé avec la Super Famicom et le nombre de canaux utilisables est passé de 3 à 8.

Lorsqu’on passera au format CD, on pourra obtenir un timbre sonore de grande qualité sans trop d’efforts. Le travail à effectuer sera alors complètement différent.

En revanche, je pense que plus on s’approchera d’une sonorité réelle (par exemple orchestrale), plus il sera difficile de lui donner un aspect « jeu vidéo ».

Finalement, cela ne change pas le fait que chaque jeu a des besoins différents en termes de musique et qu’il faut s’y adapter.


De gauche à droite : Kôichi Sugiyama, Kôji Kondô, Sadao Watanabe

Sortir la compilation de Mario World, que d’anxiété !

Q : J’aimerais, pour finir, parler du CD de Super Mario World. Pouvez-vous nous donner vos impressions sur la musique du 1er CD, de Sadao Watanabe ?

R :Que dire à part que je le trouve sublime, d’autant que je suis un fan, à la base.

Lors de l’enregistrement en studio, j’ai eu l’occasion de rencontrer Sadao Watanabe, j’étais rempli d’émotions ! En effet juste au moment ou j’entrais dans le studio, le thème « Title back » était justement en train d’être jouer, et je me suis alors demandé qui avait composé ce morceau (rires)…

Q : Le 2ème CD regroupe les musiques composées par vous même ainsi que les bruitages. Il me semble que c’est la première fois…

R : J’étais très anxieux ! Les gens allaient ils écouter mes musiques ? On m’avait dit que pour satisfaire les fans, il ne fallait surtout pas oublier d’inclure les musiques originales…

Mais quand tout fut prêt, j’étais plutôt satisfait du résultat ! Il m’arrive d’écouter les pistes dans un ordre aléatoire.

Q : Lors de l’enregistrement au studio, avez-vous beaucoup discuté avec Mr Sugiyama et Watanabe ?

R : pas vraiment, j’étais tellement absorbé !

Q : Eh bien, si vous avez un message à leur transmettre, profitez-en !

R : Qu’est ce que je devrais étudier [pour m’améliorer] ? Indiquez-moi la voie !

Q : Vous êtes bien modeste.

R : Monsieur Watanabe a sorti un livre intitulé « Jazz Study » il ya quelque temps.

Je l’avais acheté à l’époque, sans jamais vraiment l’étudier, mais je vais m’y mettre sérieusement à présent.

Quant à Monsieur Sugiyama, lors de notre rencontre, il m’avait conseillé d’écrire la musiques en partitions car cela permet d’avoir une vue globale sur le morceau.

En fait, j’ai encore énormément de choses à apprendre.

Q : Nous vous souhaitons de créer d’autres fabuleuses musiques de jeux, et attendons vos prochaines créations avec impatience ! Merci beaucoup pour cette interview.

5 commentaires :

  1. Profitez-en bien, ce n'est pas tous les jours qu'on tombe sur ce genre de sources !

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  2. Héhé super, voilà une interview intelligente. Ça ne vieillit pas en plus, il voyait déjà juste sur l'avenir de la musique de JV. Et puis quelle modestie !

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  3. En revanche, je pense que plus on s’approchera d’une sonorité réelle (par exemple orchestrale), plus il sera difficile de lui donner un aspect « jeu vidéo ».

    Excellent, c'est très visionnaire même si la tendance actuelle serait de ne plus sonner JV (à part justement chez Nintendo).

    Très très sympa comme article, merci !

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  4. Kondo, quel artiste magnifique, il restera gravé dans l'histoire du jeu vidéo à tout jamais ce gars là.

    D'ailleurs, c'est un vrai régal de le jouer au synthé .... magique ^^

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